155e sur 180 pays. Il n’y a pas de quoi jubiler sur le classement de Madagascar publié par Transparency International à propos de l’Indice de la perception de la corruption. On a le rang que l’on mérite et pour une fois il est impossible de recourir à la corruption pour améliorer ce classement. Rien d’étonnant d’ailleurs, étant donné que pauvreté rime avec corruption. Les pays les plus corrompus occupent tous la queue du classement.
Madagascar a perdu dix places par rapport à l’année dernière. Ce qui est tout à fait logique avec l’éclatement de plusieurs affaires liées à la corruption durant l’année 2017 qui ont défrayé la chronique. La plus grande est sans doute l’affaire Claudine Razaimamonjy relative à des détournements de deniers publics. Alors que la dame d’affaires était mise en détention préventive, l’intervention du ministre de la Justice de l’époque demandant sa remise en liberté a totalement décrédibilisé le système judiciaire. On attend la suite de cette affaire qui semble stagner alors que l’opinion publique attend le procès.
Puis il y eut le scandale de la vente de la villa Elisabeth à Ivandry, domaine de l’ancien chef de l’État Albert Zafy cédé à un prix dérisoire à un promoteur immobilier véreux aujourd’hui traqué par la police. L’État a annulé la vente mais le mal est fait avec la signature des documents, dont l’acte de vente, par des responsables ministériels.
La confection des cartes grises et permis soi-disant biométriques a également marqué l’année 2017 au chapitre des affaires douteuses. Une affaire de gros sous ou visiblement poussé par un besoin urgent de liquidité, on avait imposé un délai très court pour le remplacement de ces documents. Il fallait ainsi arriver à Ambohidahy des 20 heures du soir pour être sûr d’être reçu. Une fois le budget réuni, le délai a été plusieurs fois rallongé pour courir cette année. Mais au passage, les responsables ont le cynisme de déclarer que ce permis n’avait rien de biométrique et que pour ceux qui veulent conduire à l’étranger, il va encore falloir le changer. Cette fois il s’agit d’un permis anti-accident.
L’octroi de visa a également subi un changement avec le recrutement d’une société privée pour percevoir les droits que l’on payait directe à l’État auparavant.
Le classement de Transparency international ne pouvait mieux tomber. Il a été précédé par la publication des marchés publics en 2016 par l’ARMP. Des sommes pharaoniques y figuraient pour l’achat de marchandises dont la valeur a été multipliée par des millions de fois. L’État a allégué une erreur de saisie pour justifier l’énormité des montants. Ce qui n’explique qu’en partie les dépenses.
Et la publication du classement de Transparency international coïncide avec l’annulation du concours d’entrée à l’École nationale de magistrature et de greffe pour suspicion de corruption dénoncée par plusieurs entités. Alors là, c’est très mal tombé. Il n’y a pas mieux comme preuve matérielle pour percevoir la corruption. Le concours d’entrée à l’ENMG a toujours été précédé d’une mauvaise réputation comme celui de la police ou de l’Enam où semble-t-il, il faut payer un pactole pour y entrer et procéder au recouvrement des frais une fois devenu haut fonctionnaire de l’État. Comment peut-on prétendre vouloir lutter contre la corruption dans la justice si dès le départ la moralité des magistrats et greffe laisse à désirer ?
L’État doit ainsi redoubler d’efforts pour pouvoir renverser la tendance et concrétiser sa volonté de lutter contre la corruption. Il ne s’agit plus de tenir de beaux discours ni de se contenter d’intentions mais de passer aux actes.
Par Sylvain Ranjalahy
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