Si des solutions concertées ne sont pas trouvées rapidement pour mettre fin à la crise postélectorale, le pays risque de nouveau de tomber dans un marasme économique.
Les analystes de la Coface ont vu juste. Dans sa dernière évaluation des risques pays pour Madagascar, la Compagnie Française d’Assurances pour le Commerce Extérieur avait prévu que « l’organisation des élections présidentielles (de 2018) présente un risque non négligeable », en faisant notamment référence à« l’épineuse question de l’éligibilité des candidats potentiels comme Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina. »
Coup d’Etat. Actuellement, les dissensions politiques nées de cette polémique sur les prochaines élections présidentielles risquent, une fois de plus de faire tomber le pays dans le marasme économique. En effet, les conséquences désastreuses du coup d’Etat de 2009 sont encore perceptibles. Et elles risquent encore de s’aggraver si une issue constitutionnelle n’est pas trouvée rapidement afin d’éviter une autre crise économique. Faut-il en effet rappeler que depuis 2009, Madagascar a rejoint, dans le classement de la COFACE, le rang des pays à risque très élevé. Plus exactement la classe D qui est au plus bas du tableau des « risques-pays » établis par la COFACE. Depuis le retour à l’ordre constitutionnel avec l’élection de Hery Rajaonarimampianina à la présidence de la République en 2013, les programmes de relance ont été repris. Et comme il est facile de détruire, comme on l’avait fait en 2009, mais très difficile de reconstruire, la reprise économique n’a pas pu se faire que très lentement. Une reprise timide freinée par les aléas climatiques. « En 2017, la croissance, freinée par le passage violent du cyclone Enawo, alors que l’île se remettait à peine de la sécheresse provoquée par le phénomène climatique El Niño, a stagné » selon la COFACE qui estime que 2018 aurait pu être la période de la reprise.
Elan retrouvé. La COFACE confirme cette reprise en annonçant : «Toutefois, l’élan retrouvé depuis la crise politique (2009-2013) devrait reprendre sa marche en 2018. Après deux années de mauvaises récoltes, l’activité du secteur agricole, qui représente près d’un quart du PIB, devrait être plus porteuse. Dans le secteur secondaire, l’agro-industrie bénéficiera, notamment, de la montée en puissance des usines sucrières de Nosy-Be et Morondava. De son côté, l’industrie textile devrait continuer à jouir de la réintégration de Madagascar à l’African Growth and Opportunity Act (AGOA). Ce secteur devrait également être l’un des principaux bénéficiaires de l’adhésion de l’île à l’Afreximbank en juin 2017. Les perspectives pour le secteur du tourisme s’éclaircissent également après avoir souffert de la mauvaise publicité offerte par la crise politique, bénéficiant, de plus, d’une dynamique de croissance plus positive en Europe (dont est originaire la majorité des touristes). Identifié pour son potentiel dans le Plan National de Développement 2015-2019 (PND), le tourisme bénéficie de l’afflux d’investissement public. L’investissement dans le cadre du PND, visant à développer les infrastructures, devrait donc continuer à tirer la croissance, également dans le secteur de la construction. L’activité dans ce secteur bénéficiera aussi des travaux de reconstruction consécutifs au passage d’Enawo. L’adhésion de l’île à la Banque asiatique de développement pour les infrastructures (AIIB) pourrait également permettre de soutenir de nouveaux projets. En revanche, malgré la baisse de l’inflation, en lien avec l’inflexion attendue des prix des biens alimentaires, la consommation des ménages devraient rester contrainte. Toujours élevée, elle se fera ressentir, alors que plus de 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Malgré des perspectives globalement plus positives, la montée des tensions et de l’incertitude politique à l’approche des élections 2018 constitue un risque significatif dans un pays qui se remet à peine d’une crise politique majeure ».
En somme, les ambitions démesurées des politiciens malgaches ont fait beaucoup de mal à Madagascar qui reste encore et toujours dans cette catégorie des pays à risque élevé pour les investissements. Une crise de plus ne fera qu’empirer les choses.
- R. Edmond