l y a quelques mois, le magistrat Haingo Ramiandrosoa (surnommé juge Haingo) a défrayé la chronique. Il était en charge du dossier d’instruction d’Houcine Arfa. Une fois réfugié en France, ce dernier, à travers une déclaration médiatique retentissante, a accusé de corruption ce magistrat avant de porter plainte contre lui. Le Bianco a cueilli le magistrat Haingo Ramiandrosoa au Palais d’Anosy pour l’auditionner à Ambatolampy. On se souvient du tollé provoqué par cette interpellation inédite et de la levée de bouclier des magistrats qui ont fait jouer le corporatisme en observant une grève ponctuelle de solidarité. Après avoir obtenu la liberté provisoire, le magistrat Haingo Ramiandrosoa a rasé les murs pendant quelques semaines. Aujourd’hui, il a repris le travail. Il a de nouvelles attributions à la Cour d’Appel d’Antananarivo. Faut-il croire que l’action pénale à son encontre a fait l’objet d’une ordonnance de classement sans suite ou de non-lieu et qu’il n’y aura pas de procès public ? Pour certaines personnes, Haingo Ramiandrosoa a obtenu une promotion puisqu’il est passé du Tribunal de Première Instance à la Cour d’Appel. Pour d’autres, il a été nommé dans une voie de garage. En l’absence de condamnation, il bénéficie de la présomption d’innocence qui le met à l’abri de poursuites disciplinaires. La réalité est sans doute un peu plus complexe que cela. La corruption de haut vol dévoilée par Houcine Arfa, pour lui permettre de s’enfuir, a provoqué tellement de remous qu’il fallait des bouc-émissaires. Il fallait couper des têtes au sens figuré. Haingo Ramiandrosoa (juge d’instruction) et Diderot César Realy (secrétaire général du personnel de l’administration pénitentiaire) ont payé pour tout le monde parce qu’ils étaient les maillons faibles de l’une des chaînes de corruption. Si Haingo Ramiandrosoa a échappé à la détention préventive, c’est parce qu’il risquait de faire des révélations explosives corroborant celles d’Houcine Arfa. Sa brève mise en cause a donc permis de protéger la Ministre de la Justice et la Procureur de la République d’Antananarivo, du moins temporairement. La liberté provisoire d’Haingo Ramiandrosoa, son affectation à la Cour d’Appel d’Antananarivo et l’absence de sanctions prononcées par le Conseil Supérieur de la Magistrature constituent le prix du silence résultant d’un compromis qui est fragile puisqu’il volera en éclat lorsque les poursuites judiciaires engagées par Houcine Arfa donneront lieu à des auditions à Madagascar et voire à des extraditions vers la France. En attendant, pour certains observateurs de la vie politique malgache, il est choquant qu’un magistrat poursuivi pour des faits de corruption obtienne une promotion. Cela signifie que les violations de la loi sont récompensées et que le culte de l’impunité est élevé au rang de religion majeure. Pour d’autres observateurs, cette situation n’a rien de surprenant. Personne ne s’étonnera si Haingo Ramiandrosoa est promu à la Cour Suprême ou à la Haute Cour Constitutionnelle d’ici la fin de l’année. Le système judiciaire, qui est devenu la caricature de lui-même, est un concentré de toutes les inepties.
Folojaona