La Commission nationale indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) a organisé hier, à l’hôtel Ibis Ankorondrano, une table ronde sur l’urgence de l’amélioration des conditions de détention à Madagascar.
Surpopulation carcérale. Des conditions de détention inhumaines sur fond de surpopulation carcérale, qui dépassent l’entendement. Pour ne parler que de Tsiafahy où 200 personnes s’entassent et dorment à même le sol dans une cellule, normalement prévue pour 70 personnes. Sans parler de l’état de délabrement avancé des infrastructures, allant des cellules aux sanitaires, dont l’entretien et la propreté laissent vraiment à désirer ; avec tout ce que cela implique de prolifération de maladies et de risques pour la santé. Par ailleurs, les violences entre prisonniers, mais aussi celles perpétrées par les pénitenciers sont légions, combinés à la malnutrition sévère, cela bafoue non seulement les droits humains fondamentaux, mais les exposent carrément à la mort. Pas étonnant, si l’année dernière plus de 900 détenus, dont des mineurs, ont trouvé la mort en prison.
Détention préventive. Ont été principalement relevées lors de cette table-ronde les mesures à prendre en amont et en aval pour venir à bout de la surpopulation carcérale, les principales causes de cette surpopulation carcérale ; les violences au sein des maisons de détention ou des maisons d’arrêt, les conditions sanitaires, etc. Ainsi, il a été sans grand étonnement annoncé que la principale cause de la surpopulation carcérale est la tendance abusive à détention préventive. Des responsables auprès d’organisations de la société civile parlent même d’une « crise de la détention préventive à Madagascar ». « Nous avons visité une prison dans le Sud-est de l’île, près de 90%, pour ne pas dire 100% des détenus n’ont pas encore été auditionnés et condamnés. Alors que la Constitution malgache même stipule que la détention préventive est une exception, le mandat de dépôt (MD) devient carrément systématique, avec de l’autre côté une lenteur exagérée des procédures d’audience et de jugement (environ 50% des détenus sont prévenus). C’est aberrant et il s’agit bien d’une injustice ».
Systématisation du MD. Lors de la table ronde, il a été relevé que la corruption qui sévit encore dans le milieu de la Justice fait partie des facteurs qui favorisent la systématisation des MD. Toutefois, bien que connus de tous au niveau de la pratique ces cas de corruption et de vices de formes ne sont pas évidents à prouver, s’ils ne sont pas habilement coordonnés, voire camouflés. Ainsi, des solutions ont été avancées, à savoir : la construction de lieux de détention supplémentaires (prévus et promis par le ministère de tutelle pour 2019) ; l’éducation et l’information de la population sur ses droits avant, pendant et après toute procédure administrative pouvant mener à l’incarcération ; et enfin le renforcement, voire la mise en place de dispositifs de contrôle et de sanctions plus poussés sur les cas de corruption et vices de forme au niveau du Tribunal de première instance, afin d’éviter et/ou de limiter la systématisation de la détention préventive.
Luz Razafimbelo