Amnesty International a recueilli les témoignages de quatre femmes qui ont déclaré avoir été arrêtées pour des infractions supposément commises par leur mari ou un proche. Deux d’entre elles ont dit avoir été arrêtées et placées en détention pour inciter leur mari à se rendre quand la police ne les trouvait pas.
C’est le cas de Zana*, 38 ans. La police soupçonnait son mari d’être responsable de la disparition de membres de sa famille qui avaient passé une nuit chez eux le mois précédent. Le juge d’instruction a envoyé Zana en détention préventive à la MC de Fianarantsoa, où, au moment de l’interview, elle avait passé deux ans et trois mois.
« Ils m’ont demandé où était mon mari. Je leur ai dit qu’il était au marché, où il vendait des cacahuètes. [Mais] les policiers ne sont pas partis à sa recherche […] ils m’ont emmenée. Ils m’ont dit que s’il venait, ils me libéreraient […] Depuis mon arrestation, mon mari n’est jamais venu me voir. Je ne sais pas pourquoi. Peut- être qu’il ne m’aime plus. »
La maison centrale de Fianarantsoa comptait alors 46 autres détenues. Seules 13 d’entre elles avaient été condamnées.
En 2011, le Comité contre la torture a fait part de ses préoccupations concernant cette pratique exercée à Madagascar et a déploré « les allégations suivant lesquelles des femmes auraient été arrêtées et détenues en lieu et place de leur mari pour contraindre ces derniers à se rendre aux forces de l’ordre. » « L’État partie devrait veiller à mettre fin à la pratique consistant à prendre en otage les proches des auteurs présumés d’infractions, et diligenter des enquêtes à l’effet de punir les coupables, a recommandé le Comité. Cette pratique très grave viole les lois nationales et les principes fondamentaux des droits de l’homme. »
Considérant l’ampleur des souffrances infligées aux détenus par le personnel pénitentiaire, que nous décrivons dans ce rapport, Amnesty International estime que lorsque la détention est intentionnellement infligée à une personne ou un membre de sa famille aux fins de la punir, de faire pression sur elle ou de l’intimider, pour tout motif fondé sur une forme de discrimination, notamment liée à sa situation sociale, ces mauvais traitements constituent des actes de torture tels que définis à l’article 1(1) de la Convention des Nations Unies contre la torture.