Une situation chromique. C’est le moins que l’on puisse dire à propos de ce qui est advenu à la société Kraomita Malagasy. Un fleuron des entreprises locales qui a résisté au vent de la privatisation des années 90. Puis en un tournemain, elle est passée entre les mains d’un repreneur russe et se trouve aujourd’hui incapable de payer ses employés. On ignore par quelle procédure la société a été vendue sans qu’il ait eu appel d’offres. Une affaire qui sent la corruption à mille lieues.
Curieusement, les autorités semblent accepter la situation malgré la grève des employés. Le Bianco semble pour le moment peu enclin à ouvrir une enquête sur ce qui ressemble à une haute trahison. L’État aurait dû purement et simplement annuler la vente. Kraoma ne se trouvait pas en difficulté financière pour justifier sa cession. Pendant la Transition Kraoma affichait une santé de fer pour le bonheur des membres du conseil d’administration. On peut donc comprendre les employés qui sont en grève face au pillage en coupe réglée de leur entreprise. La nomination d’un nouveau DG n’a pas aplani les problèmes, encore moins l’annonce faite par un employé lors de l’assemblée générale à Brieville.
S’il y a une affaire qui aurait dû préoccuper en premier le nouveau régime, c’est bel et bien cette entourloupe au sein de Kraoma. L’Etat est en train de perdre des ressources financières importantes qui peuvent servir à concrétiser certains projets de l’IEM. Alors qu’il s’est empressé d’arrêter et d’emprisonner un ancien conseiller de l’ex-président qui a volé ses propres mobiliers du bureau. Une affaire montée en épingle par les réseaux sociaux pour donner une dimension qu’elle n’avait pas doigts de l’État.
Maintenant, certains responsables directs de cette supercherie ont pu passer à travers les mailles des autorités pour passer tranquillement des vacances dorées à l’étranger. Ils ont profité de la passivité de l’État affairé à nommer les nouveaux barons du pouvoir et oubliant de donner une interdiction de sortie du territoire aux anciens gouvernants. Le temps qu’on fasse la lumière sur certaines affaires louches qui ont émaillé le dernier régime. Des affaires loin d’être minces, à l’instar des contrats passés avec la Jirama, la grosse arnaque sur les permis biométriques, le racket sur le visa d’entrée octroyé à une société privée, la vente des patrimoines de l’État comme la villa Elisabeth. Aussi curieux que cela puisse paraître, l’État semble peu pressé à enclencher des poursuites sur les auteurs de ces flagrants délits. A preuve, les députés n’ont jamais voulu adopter le projet de loi sur le recouvrement des avoirs illicites malgré l’insistance du Fonds monétaire international. Tous pourris?
Eric RANJALAHY