Tentaculaire. Le mot résume la complexité et l’ampleur de l’affaire Claudine Razaimamonjy, femme d’affaires. Une tourmente judiciaire qui a démarré en avril 2017, touchant des délits financiers et des actes de corruption.
« Il s’agit d’une affaire assez compliquée. Vu l’ensemble les poursuites concernent un même objet. Seulement, par la complexité et surtout le fait que plusieurs ministères sont concernés, les enquêteurs ont préféré sectionner les dossiers et les traiter ministère par ministère. Ceci af1n d’être plus précis et éviter des confusions au risque de ne pas s’y retrouver », explique une source avisée, s’agissant des multiples comparutions de la femme d’affaires devant le parquet du Pôle anti-corruption (PAC).
La dernière en date est, jeudi. Claudine Razaimamonjy, toujours en détention préventive, a été transférée pour l’occasion à la maison d’arrêt d’Antanimora. Bien que des voix affirment que son état de santé se serait dégradé, cette hôtelière anciennement proche des ténors de l’administration Rajaonarimampianina s’est bel et bien présentée devant le juge d’instruction du PAC, aux 67ha, jeudi. Sa comparution s’est terminée tardivement.
« Il s’agit d’une nouvelle comparution, pour un dossier qui concerne un autre ministère », est la seule information qui a f1ltré de cette audition. Arrêtée en avril 2017 et placée en détention préventive à la maison d’arrêt d’Antanimora, avant d’être transférée à la prison pour femmes de Manjakandrina, Claudine a plongé à cause d’un dossier concernant des subventions spéciales de communes. Un sujet qui concerne le ministère de l’Intérieur.
Privilège de juridiction
Détournement de deniers publics, corruption et favoritisme dans l’attribution de marchés sont les charges retenues contre la femme d’affaires, à l’époque. Les détournements des subventions destinées à la fameuse commune d’Ambohimahamasina, dans la région Haute Matsiatra, en fait partie.
Une fois en détention, pourtant, le transfert des dossiers traités par le Bureau indépendant anti-corruption (Bianco), happant l’hôtelière, devant l’ancienne Chaîne pénale anti-corruption (CPAC), et ensuite le PAC se sont enchaînés. Des dossiers avec des charges relativement similaires, mais qui concernent donc, des département ministériels ou entités publiques différentes. La dernière comparution de Claudine Razaimamonjy qui a défrayé les chroniques remonte à mars 2018.
Il s’agit d’une poursuite pour favoritisme dans l’attribution de marchés publics, détournement et recel de deniers publics. Une affaire qui touche ici, l’ancien ministère de l’Emploi et de l’enseignement technique et qui consiste en des malversations qui remontent à l’année 2016. « Co-accusée », dans cette affaire, l’hôtelière a été « relaxée au bénéf1ce du doute », à l’issue de son premier jugement. Des « responsables ministériels », ont, également, été sur le banc des accusés.
Un temps, en réponse aux interpellations quant au risque d’acharnement politique, Jean Louis Andriamif1dy, directeur général du Bianco, avait expliqué que les grosses affaires traitées par son bureau concernent souvent ceux qui sont ou ont été au pouvoir, « puisqu’on ne peut pas faire des malversations sur les deniers publics sans être détenteur du pouvoir de les gérer ». Il a déjà déploré que « les privilèges de juridiction », épargnent à une certaine catégorie de personnes, les poursuites.
Un regret partagé par un courant au sein de la magistrature, notamment, au niveau du PAC. Dans le cadre de l’affaire Razaimamonjy, le Syndicat des magistrats de Madagascar (SMM), avait déjà dénoncé que de « hauts responsables étatiques » pouvant être, «les auteurs principaux », ne sont pas inquiétés. Un point souligné par Clément Jaona, actuel président du SMM, dans une interview télévisée, il y a quelques semaines.
La Constitution prévoit que « les présidents des Assemblées parlementaires, le Premier ministre, les autres membres du gouvernement et le Président de la Haute cour constitutionnelle sont pénalement responsables, devant la Haute Cour de Justice, des actes accomplis liés à l’exercice de leurs fonctions et actes qualifiés de crimes ou délits au moment où ils ont été commis ».
Garry Fabrice Ranaivoson