Deux personnes, dont un proche d’Olivier Mahafaly Solonandrasana, ont été placées sous mandat de dépôt hier, pour des faits de favoritisme, de cadeau illicite et de faux et usage de faux en écriture publique. Quant à l’ancien Premier ministre et ancien ministre de l’Intérieur de la décentralisation, il a été également auditionné par le Bianco.
Les entités en charge de la lutte anticorruption ne chôment pas. De sources concordantes, l’ancien Premier ministre Olivier Mahafaly a été auditionné récemment par le Bureau indépendant anticorruption (Bianco), tout comme quelques-uns de ses collaborateurs à la Primature.
Il s’agit d’une affaire qui remonte au mois d’août 2017, lorsque la branche territoriale du Bianco à Antsiranana a été saisie de plusieurs doléances, rapportant des faits de suspicion de favoritisme dans l’octroi de marchés relatifs à la construction des bureaux des cinq communes rurales environnantes. A l’époque, ces localités ont pu bénéficier des subventions exceptionnelles octroyées par le ministère de l’Intérieur et de la décentralisation.
Les investigations menées par le Bianco ont pu alors mettre en lumière l’existence de favoritisme à grande échelle. En effet, aucun appel d’offre n’a été lancé, mais les élus locaux auraient attribué les marchés en question, à une seule entreprise appartenant à une épouse d’un haut responsable, auprès de la Primature.
Les doléances parvenues entre les mains du Bianco ont d’ailleurs révélé que ces élus locaux auraient reçu l’ordre de virer directement les subventions sur le compte bancaire de la personne, sans que les travaux n’aient été achevés ni commencés.
Un milliard d’ariary comme enjeu
Au-delà des faits de favoritisme, après l’examen de l’affaire, l’existence de pots-de-vin et de cadeau et de faux et usage de faux en écriture publique, a également été révélée. A noter que l’enjeu financier de ces marchés s’élève à près d’un milliard d’ariary.
Jusqu’ici, sept personnes ont ainsi été déférées, auprès du Pôle anticorruption (Pac), qui est la juridiction de référence du Bianco. Par ailleurs, cinq maires ont été mis sous contrôle judiciaire et deux personnes, en l’occurrence, un haut fonctionnaire au sein de la Primature et la gérante de l’entreprise bénéficiaire, ont été placées sous mandat de dépôt hier, dans la soirée.
Olivier Mahafaly impliqué ?
A la lumière des investigations conduites par les responsables, auprès de l’organe en charge de la lutte anticorruption, il apparait que l’ancien ministre de l’Intérieur et de la décentralisation et ancien chef de gouvernement, Olivier Mahafaly Solonandrasana, serait impliqué dans cette affaire.
Une source autorisée a d’ailleurs confirmé que cette personnalité a été récemment auditionnée par le Bianco. En charge du département Intérieur et décentralisation, en 2017, cette entité ne semble pas étrangère à cette nouvelle affaire de favoritisme en abusant des subventions exceptionnelles. Le dossier pourrait également faire l’objet de saisine auprès de la Haute cour de justice (HCJ).
Lutte contre l’impunité
D’autant que l’article 13 de la loi n°2014-043, relative à la Haute cour de justice, stipule que «La Haute cour de justice est compétente pour juger les actes accomplis, liés à l’exercice de leurs fonctions qualifiés de crimes ou délits au moment où ils ont été commis, par les présidents des Assemblées parlementaires, le Premier ministre, les autres membres du Gouvernement et le président de la Haute cour constitutionnelle».
En tout cas, jointe au téléphone, une source auprès du Bianco ne s’est pourtant pas exprimée sur le sujet. La source indique seulement que les diverses investigations et auditions menées par le bureau ces temps-ci n’ont aucune visée politique.
«Contrairement aux informations véhiculées par certains, il ne s’agit en aucun cas d’une chasse aux sorcières (…). La lutte contre la corruption est menée pour l’intérêt de tous et de la Nation et aussi de la lutte contre l’impunité», a-t-elle indiqué, tout en notant que tous les anciens ou futurs dirigeants du pays qui ont ou auront les mains sales, devront dorénavant s’inquiéter sérieusement.
J.P
Associé à Claudine Razaimamonjy
Pour les observateurs avertis, ce n’est pas la première fois que le nom de l’ancien Premier ministre, et ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, est cité dans une affaire d’octroi de subventions exceptionnelles à des fins douteuses. C’était déjà le cas avec l’affaire du détournement de subventions exceptionnelles dans la commune d’Ambohimahamasina à laquelle son nom est aussi associé à celui de l’opératrice économique Claudine Razaimamonjy. Cette dernière se trouve d’ailleurs en prison depuis un moment. Ce qui n’est pas encore, jusqu’ici, le cas de l’ancien Premier ministre.