« La loi est faite pour tout le monde ». Le garde des Sceaux affirme ainsi une inflexibilité sur des sujets d’actualité impliquant la Justice, notamment, celle de la Cour d’appel de Toamasina.
Défiance. À l’entendre, c’est ainsi que Jacques Randrianasolo, ministre de la Justice, considère le verdict pris par la Cour d’appel de Toamasina, la semaine dernière. En marge d’un culte à l’église catholique de Faravohitra, hier, pour marquer le 60e anniversaire de l’administration pénitentiaire, le garde des Sceaux a apporté sa version sur deux faits d’actualité concernant son département et le système judiciaire.
Dans sa réaction, le ministre Randrianasolo s’est quelque peu attardé sur l’affaire relative à la libération provisoire de Hajanirina Dina Manantena, chef de file présumé d’un réseau de kidnappeurs. Un acte qui a valu la suspension de cinq magistrats de la Cour d’appel de la capitale de la région Atsinanana.
« Comme tout fonctionnaire, ceux qui ne respectent pas la discipline sont sanctionnés. (…) Nous nous sommes engagés à assainir la justice. Lorsqu’il y a ceux qui ne font pas correctement leur travail, il faut sévir », affirme le membre du gouvernement.
« C’est comme s’il s’agissait d’une défiance », soutient le garde des Sceaux. Faisant part de sa version des faits à la presse, il déclare, « j’étais à Toamasina, jeudi et vendredi. J’ai parlé avec les magistrats. Je leur ai demandé de faire attention à ce que les kidnappeurs, particulièrement, celui dénommé Haja ne soit pas libéré, étant donné qu’il est le cerveau des rapts dans le pays. Le lundi d’après, le Premier ministre était sur place et a fait pareil. Il a tout de même été libéré ».
Sur sa lancée, le ministre de la Justice affirme que « (…) pour moi, il y a de la corruption derrière cette libération ». Il ajoute ainsi, qu’une enquête est déjà en cours sur les circonstances de la mise en liberté provisoire de celui qui est, notamment, accusé d’être aux manettes du rapt d’un opérateur économique, à Toamasina, en novembre dernier.
Régularisation
Ce sera au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), de statuer sur l’opportunité ou non de la suspension édictée par le ministre Randrianasolo. En attendant, les juges concernés comptent contester la décision du garde des Sceaux. « Ils ont le droit de contester cette décision, mais le ministère de la Justice restera inflexible », réplique-t-il, toutefois. La démarche de contestation devant la Cour administrative porterait, cependant, sur la forme de l’acte.
Suspendre un magistrat est une prérogative propre au ministre de la Justice, « saisie d’une plainte, ou informer des faits paraissant de nature à entraîner des poursuites disciplinaires contre un magistrat ». Un droit qu’il a réaffirmé, hier.
L’acte de suspension des cinq juges de Toamasina n’aurait pas été signé par Jacques Randrianasolo. Ce sujet n’a, cependant, pas été abordé, hier, à Faravohitra. Une source judiciaire explique, néanmoins, qu’un acte administratif irrégulier peut faire l’objet « d’un retrait ».
Il s’agit d’une procédure où un acte administratif peut faire l’objet d’une régularisation dans un délai de trois mois après son émission.
Aux oreilles de certains observateurs, par ailleurs, une partie des propos du garde des Sceaux, hier, sonnait comme un procès d’intention contre un accusé dans une affaire judiciaire toujours en cours. En le qualifiant sans ambages de « cerveau », d’un réseau de ravisseurs, Jacques Randrianasolo pourrait entamer la présomption d’innocence et altérer l’indépendance du juge, censé statuer selon la loi et son intime conviction.
Outre l’affaire de Toamasina, il a, également, été intraitable, hier, s’agissant des affaires de vente de domaines de l’Etat où des anciens responsables du service des domaines ont été placés en détention préventive. En réaction le syndicat des inspecteurs des domaines, auquel ils appartiennent, menace de faire grève s’ils ne sont pas libérés.
« Ils ont le droit de faire la grève, mais ces personnes ont transgressé la loi. (…) La loi est faite pour tout le monde et s’applique à tous »