Le cercle des docteurs s’agrandit à l’université de Toliara. En effet, Edally Ranoelison Tovondrainy est titulaire du grade de docteur à la faculté de Droit de l’université de Toliara, après avoir soutenu la semaine passée, au grand Amphithéâtre de Maninday, sa thèse de doctorat dont l’objet de recherche est la justice populaire ou le « Fitsaram-bahoaka ». Ainsi, après avoir su convaincre les membres du jury de l’utilité de son mémoire, il a pu obtenir la mention Honorable. Cette thèse s’inscrit dans le cadre d’une science sociale comme l’illustre son titre : « Défaillance de l’Administration étatique et justice populaire : cas du Sud-Ouest malgache ».
Il a été démontré dans ce travail, étayé par des exemples comme le cas d’Antsakabary, ou de Soamahanina, qu’il est d’actualité et que la trame qui a permis de générer la thèse, peut se résumer de la manière suivante : quand il y a défaillance de l’administration de la société, les victimes de l’injustice s’organisent pour appliquer une sorte de justice immédiate qui peut prendre deux formes. La première que nous pouvons appeler variante faible est le lynchage du coupable en dehors de toute présomption d’innocence et de droit à la défense. La deuxième est la variante forte, qui se manifeste par une organisation plus ou moins légitime, plus ou moins légale appelée Dina. Ces deux formes de justice sont appelées péjorativement « justice populaire » parce qu’elles sont l’œuvre d’une foule qui représente la population ou bien elles sont l’œuvre d’une population qui a établi un code de justice auquel tous les membres de la population se soumettent.
Manque de confiance
Ces derniers temps, cette forme de justice qui se traduit par la vindicte populaire, s’est multipliée à Madagascar. Selon l’impétrant le phénomène n’est pas nouveau et s’explique par l’insécurité d’une part, en particulier en brousse, où les forces de l’ordre sont en effectif insuffisant ou arrivent trop tard quand on les appelle. En clair, la justice populaire traduit un manque de confiance de la population en la justice pour sanctionner les délinquants, car même si ces derniers sont appréhendés, ils ne sont pas forcément condamnés à cause de la corruption. De ce fait, les gens agissent eux-mêmes.
Ainsi, le Dina qui est une institution traditionnelle modernisée au service de la sécurité publique, semble être la panacée du problème. Pourtant, bien que cette charte communautaire ait reçu l’homologation de l’Etat, son organisation connaît quelques imperfections au risque de la fragilise. Néanmoins, cela n’enlève en rien à son efficacité car la lourdeur des sanctions et la rigueur du comité d’exécution dans son application sont à la base de la réussite de cette institution, souligne-t-il.
Ainsi, pour conclure, Edally Ranoelison Tovondrainy avance que la société malgache doit s’engager dans une perspective d’appropriation du Dina dans le concept de fihavanana, de manière à désengorger la justice institutionnalisée. C’est en cela que réside l’intérêt de ce travail en proposant le Dina comme une alternation à la justice étatique en situation de crise. Le jury était composé du Pr Alphonse Dina de l’université de Toliara, président du jury ; de deux Co-rapporteurs, le Pr Jean Bertin Iréné Ramamonjisoa et Pr Clarisse Rasoamampionona ; de deux co-directeurs de thèse : le Pr Jenane Ravaosolo, et le Pr Henri Rasamoelina ; et enfin un juge : le Pr Barthélemy Manjakahery. Le Pr Alphonse Dina n’a pas tari d’éloges à l’égard du Dr Edally. Il s’est montré fier du parcours de l’impétrant et surtout de son audace à mettre en exergue ce sujet brûlant de l’heure, dans tout le pays et surtout dans le Sud-Ouest de Madagascar.
Francis Ramanantsoa